Le tribunal correctionnel de Marseille les a condamnés à 100 heures de
travail d’intérêt général, vendredi 9 janvier. Les associations "La Jeunesse Arménienne de France" et "Résister Aujourd'hui" s'étaient constituées parties civiles.
Deux militants d’un groupuscule d’extrême droite ont été condamnés,
vendredi 9 janvier, à 100 heures de travail d’intérêt général pour la
profanation d’une stèle édifiée à la mémoire du poète et militant communiste
Missak Manouchian à Marseille. Devant le tribunal correctionnel, David
Guichard, 42 ans, gardien d’immeuble, et Olivier Bianciotto, 30 ans, chef
d’équipe en sécurité incendie, ont reconnu leur participation, le
6 septembre 2014, à une « action pour le devoir et contre les
terroristes rouges ».
Ils avaient recouvert d’un drap blanc le buste érigé en surplomb du
Vieux-Port à la mémoire du résistant d’origine arménienne. La manifestation
était organisée par le Mouvement populaire nouvelle aurore (MPNA), un groupe
non déclaré, créé dans les premiers mois de 2014 à Marseille et rassemblant une
dizaine de personnes, selon les services spécialisés.
La mise en ligne sur le site Internet du MPNA d’une vidéo de six minutes
filmée lors de la profanation avait scandalisé la communauté arménienne
marseillaise pour laquelle le jardin Missak Manouchian constitue un lieu de
mémoire et rappelle que le résistant, membre des FTP-MOI était, comme de très
nombreux arméniens, arrivé en France par Marseille. Sur cette vidéo, les
militants d’extrême droite décrivent Missak Manouchian comme « un
terroriste communiste, tueur de Français ». On entend un militant
vociférer : « Manouchian, grosse merde, on ne veut pas de ça
à Marseille. »
« Me rapprocher d’un groupe
partageant mes idées »
La présence de son numéro de téléphone à l’onglet « Contact
militant » sur le site du MPNA avait rapidement permis l’identification
d’Olivier Bianciotto puis de son ami David Guichard. A l’audience, les deux
prévenus ont contesté leur appartenance à ce groupuscule et prétendu avoir
assisté à cette manifestation par simple curiosité, sans jamais avoir entendu
parler de Missak Manouchian. « Si j’avais su la portée que cela
avait, je me serais bien gardé d’y aller », a expliqué Olivier
Bianciotto, adhérent jusqu’à sa dissolution en juillet 2013 des Jeunesses
nationalistes. « Depuis, j’étais un peu isolé, c’est pour ça que
je cherchais à me rapprocher d’un groupe partageant mes idées. »
Le prévenu a présenté ses excuses à la communauté arménienne tout en se
plaignant d’être un « animal traqué » par les
militants antifacistes marseillais. « Ce milieu, quand vous mettez
un pied, vous n’en sortez plus. Les nationalistes vous traitent de traître et
les antifas me réservent un traitement particulier : menaces, agressions,
tags sur mon domicile. »
« C’est le procès de la bêtise et
c’est cela qui fait peur »
Condamné à plusieurs reprises pour des violences et ports d’arme, David
Guichard justifie participation à la profanation « pour voir qui
étaient ces gens-là afin de ne pas rester seul ». En
septembre 2014, il avait été sanctionné d’un rappel à la loi pour apologie
de la haine, après la diffusion sur Internet d’une photo le montrant en train
de faire le salut nazi. Il a présenté ses « sincères
regrets » et précisé que sa compagne, d’origine arménienne, avait
qualifié de « débile » sa participation à cette
manifestation.
« C’est le procès de la bêtise et c’est cela qui fait peur », a estimé la
procureure Anne Lezer qui a requis un travail d’intérêt général « en
lien avec ce qu’ils ont commis ». Bêtise aussi dans la bouche de Me Alain
Lhote, avocat de l’association « Résister Aujourd’hui », partie civile. « A ces pantins de la
bêtise absolue, à ces lâches qui ne connaissent rien à notre histoire et nous
offrent un spectacle indigne, il faut dire : “Je suis Missak
Manouchian” », a lancé l’avocat avant de lire L’Affiche Rouge
d’Aragon.
Mais pour l’association Jeunesse arménienne de France, représentée par Me Serge Tavitian, « l’ignorance n’a jamais été une excuse ni une atténuation de responsabilité ». L’avocat a « refusé les excuses » des prévenus car « vos actes vous ne les assumez pas ». Le tribunal a fixé à deux mois d’emprisonnement la peine qui s’appliquerait en cas de non-exécution dans un délai de dix-huit mois du travail d’intérêt général.
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