19 octobre 2011

Intervention de Michel Vial au Théâtre Toursky à Marseille

 Après ce poème de Léo Ferré déclamé par notre ami Richard Martin, après tous les intervenants que nous venons d’entendre,

nous avons encore plus de raisons de résister aujourd’hui.

 « Résister Aujourd’hui » , notre association a été créée en 1994, à l’initiative d’anciens Résistants pour perpétuer la mémoire, l’esprit et les valeurs de la Résistance, pour dénoncer toute apologie et résurgences du racisme, de l’antisémitisme et des thèses d’extrême droite

 Dès notre création notre comité de parrainage comprenait, à l’image du Conseil National de la Résistance des personnalités de toutes tendances politiques ou confessionnelles

 C’est en nous appuyant sur nos statuts, nos engagements et notre comité de parrainage que nous organisons cette réunion-débat. Nous voulons réunir en un seul élan tous ceux qui se reconnaissent dans les valeurs que défendaient les Résistants, qu’on soit de gauche, de droite ou d’ailleurs. 

Au plateau de Glières les 14 et 15 mai 2011 des vétérans de la Résistance nous appelèrent à une insurrection pacifique.

 Après le succès de ce rassemblement, avec le frémissement actuel de tous les indignés du monde, devant les percées extrémistes en France et ailleurs, avec les atteintes contre les acquis du programme du Conseil National de la Résistance,

 Nous vous appelons à un sursaut citoyen et pensons que le Théâtre Toursky peut être un des ferments de cette insurrection pacifique et humaniste.

C’est une nouvelle étape pour la reprise en mains de nos destinées dans une France plus juste, plus démocratique, plus généreuse où chacune et chacun pourra travailler, se nourrir, se loger, se soigner, s’éduquer et se cultiver comme le prévoyait le programme du CNR et comme le 1er gouvernement de  4ème République a eu la lucidité et le courage de l’appliquer dans une France bien plus pauvre qu’aujourd’hui.

 Nous aborderons ce soir plusieurs points :

·        La banalisation des idées d’extrême-droite

·        La défense des acquis du programme du CNR

·        Le devoir de mémoire.

 Il y a eu beaucoup de sacrifices et de souffrances pour libérer l’Europe de la folie hitlérienne.

 Et 66 ans après la capitulation nazie et le retour des camps de la mort, les crimes racistes, la xénophobie, l’intolérance et le rejet de l’autre restent une réalité.

On sème ainsi impunément la haine envers l’autre en banalisant les idées d’extrême-droite  et de la parole aux actes, le pas est vite franchi.

 Cet été en Norvège les idées d’extrême droite ont encore armé le bras d’un fanatique.

 Nous avons en mémoire, les cinq petits fachos nourris aux thèses de l'extrême droite qui ont profané en 1990, le cimetière juif de Carpentras.

En 1995, l’assassinat du jeune comorien de 17 ans, Ibrahim Ali, par des colleurs d’affiches du Front National                                                                                                                          

L'assassinat du Marocain sortant de la mosquée à St Etienne, et combien de souffrances et d'humiliations à connotation raciste depuis.

 A travers toute l’Europe, c'est à celui qui sera le champion de l'intolérance et cela créé un climat xénophobe et raciste qui aboutit à ces actes monstrueux et qui demain peut nous replonger dans l’obscurantisme et le fascisme d’hier.

 Nous ne sommes pas en reste en France.

 Au 2ème tour des cantonales cette année le FN a très souvent récolté de 45 à 50% de voix.

Les électeurs n’ont plus honte de voter pour le FN et d’après un sondage 52% des français estiment que le FN devrait être considéré comme «un parti comme les autres»

 Il y a quelques années seuls le Front National et le MNR étaient porteurs d’idées racistes, antisémites et xénophobes et nous les stigmatisions chaque fois avec force.

Tous les partis républicains de droite ou de gauche rejetaient  le FN, ses propos et ses actes

 Rappelons-nous cette déclaration d’un homme politique 

Je cite

« Je n'ai pas l'intention d'accepter la moindre parole qui serait de nature raciste ou antisémite. Je ne connais qu'une stratégie, celle de la tolérance zéro : ne rien accepter et sanctionner tout de suite. Il n'y a jamais d'acte antisémite ou d'acte raciste qui soit mineur. Qu'il s'agisse d'une parole ou d'un geste, qu'il y ait des victimes ou non, c'est toujours quelque chose de grave »?

fin de citation.

C’était simplement, Nicolas Sarkozy, le 25 juillet 2005.

 Depuis, le vote des intolérants est considéré un appoint indispensable, certains élus, souvent des ministres en fonction et la Droite Populaire endossent le maillot de défenseur des idées d’extrême droite.

Les peurs, les inquiétudes , les angoisses instrumentalisées favorisent la montée de l’intolérance.

 Aujourd’hui, en 2011, une grande partie de nos concitoyens ne croit pas et ne mesure pas le danger de la résurgence de ces thèses.

 Pour que les valeurs de la résistance ne soient pas trahies

nous devons dénoncer cette banalisation afin de stopper cette poussée extrémiste.

nous devons rester fidèles à la mémoire et aux engagements de ceux qui se sont battus

au risque de leurs vies pour défendre nos libertés.

nous devons exiger de ceux qui nous gouvernent ou qui veulent nous gouverner

une attitude ferme face à la banalisation des idées d’extrême droite.

 2ème thème

la défense des acquis sociaux et culturels du programme du CNR

 Le Conseil National de la résistance créé par Jean Moulin le 27 mai 1943  était composé de démocrates de tout horizon politique ou confessionnel

8 mouvements de la Résistance, 6 partis politiques et 2 syndicats.

Le 15 mars 1944, ils adoptaient le programme du Conseil National de la Résistance.

 67 ans après son adoption, ce texte est pour nous une double source d’inspiration, pour l’esprit qui l’anime et pour les institutions qu’il a permis de fonder.

 Ce programme préparait la renaissance de la France 

après cinq années de trahison, de fascisme vichyssois soutenu par le nazisme hitlérien,

après cinq années de souffrances et de sacrifices.

 Ce texte audacieux est à l’origine de nombreuses conquêtes (la sécurité sociale, les retraites généralisées et décentes, le droit au travail, à la santé, à l’éducation et à la culture pour tous,             la maîtrise des services publics, la liberté de la presse et son indépendance, le retour à la nation des grands moyens de production, des cies d’assurance et des grandes banques

 Il y avait, dans ce programme l’affirmation d’une vision et cette vision est toujours valable aujourd’hui.

 Et la vidéo que nous avons vu au début de la soirée nous rappelle l’impérieuse nécessité de défendre ces acquis et demander aux candidates et candidats à un mandat public de s’engager.

 Quand on voit, en France, que les 1% les plus riches possèdent 24% de la richesse du pays tandis que les 50% les moins bien lotis n’en possèdent que 6%, Il y a un hold up des banques et des marchés financiers sur la répartition des richesses créées par tous.

 La santé, l’éducation, la culture sont sacrifiées et laissées aux mains du privé ou du pouvoir en place et échappe au contrôle des citoyens.

 Quand nous voyons le pouvoir actuel arrêter et chasser les Rroms cela nous rappelle combien les Tziganes comme les juifs ont déjà payé, sous Vichy, cette politique raciste et xénophobe.

Les femmes et les hommes de ce pays doivent  retrouver leur dignité.

On ne peut se taire plus longtemps, il est temps de se rebeller et de placer tous ceux qui cautionnent pareille politique, contraire aux idéaux de la Résistance, devant leurs responsabilités ? 

Quelques textes nous permettent de retrouver l’esprit et les valeurs de la Résistance.

Ce sont des textes tous empreints de Justice, de Générosité, de Liberté, de Fraternité et d’Egalité

  • le programme du CNR bien sûr

      mais aussi

  • l’Appel des Vétérans de la Résistance du 15 mars 2004
  • l’Appel de Thorens Glières (Raymond Aubrac et Stéphane Hessel) le 14 mai 2011 
  • la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948 est également un texte référent dont René Cassin a été un des principaux rédacteurs et auquel Stéphane Hessel a participé.

 Attentifs à ces textes, nous devons manifester notre réprobation et notre opposition devant le démantèlement des acquis du programme du CNR et exiger avec force son actualisation et  la création d’un projet ambitieux pour le XXIème siècle.

 Je voudrais parler du devoir de mémoire,  tout le monde l’évoque mais il y a beaucoup de confusions et de remises en cause.

 La mémoire doit être une mémoire vive où mémoire et réflexion se côtoient.

 La mémoire vive, c’est permettre une compréhension des événements et des actes d’hier, permettant ainsi de mieux construire son avenir.

L’histoire de la société depuis des siècles s’est construite à partir d’une utopie, d’un espérance en des jours meilleurs, dont les femmes et les hommes ont besoin.

Les combats de nos aînés ont été menés à partir de la vision de la société à laquelle ils aspiraient pour leurs enfants.

En menant cette bataille de la mémoire, nous faisons connaître l’utilité de leurs luttes, l’histoire de l’émancipation humaine qui a conduit à la conquêtes des valeurs républicaines qui constituaient  jusqu’à aujourd’hui le socle de notre société.

Plus que jamais, nous avons besoin que se construise, entre les idéaux des Résistants d’hier et les volontés des citoyens-résistants d’aujourd’hui, une large osmose capable de donner un nouveau souffle aux acquis démocratiques, sociaux et culturels de 1945.

Quand nous dénonçons ces atteintes aux libertés fondamentales, c’est pour mieux faire comprendre les mécanismes, toujours semblables qui peuvent conduire à nouveau à l’émergence des forces les plus rétrogrades et à la barbarie écrasant les droits élémentaires de la Démocratie, que ce soit en France ou ailleurs.

Nous devons montrer et analyser les engrenages des intolérances mais aussi la responsabilité de l’homme et de la femme d’aujourd’hui, nous devons informer, et encore informer afin que chacun, notamment les jeunes soient conscients des dangers et se comportent en citoyens responsables.

La mémoire vécue de nos anciens nous rappelle que dans les années trente c'est sur le terreau du chômage et de la misère grandissante que germa le fascisme en Italie et le nazisme en Allemagne. 

Ce sont les mêmes conditions relatives qui avivent, encore aujourd'hui, haines raciales et passions nationalistes. N’oublions pas que la crise économique de 1929 déboucha sur la montée du fascisme, du franquisme, du nazisme et sur la 2ème guerre mondiale.

Avec cette compréhension, comment ne pas réagir vivement à la suppression des enseignements d’histoire dans les classes de terminales scientifiques. L’histoire est une matière transversale, indispensable à tous. Cette suppression est un déni de devoir de mémoire.

Nous demandons aux côtés des Résistants, que l’histoire de la Résistance et de la Déportation soit enseignée, dans tous les collèges et lycées.

Nous demandons également que le 27 mai, jour anniversaire de la création du C.N.R., devienne journée nationale de la Résistance.

Ce jour serait évoqué, dans toutes les écoles, ce que fut la Résistance, ses buts, son rôle, ses idéaux.

Nous demandons aux candidats aux présidentielles et aux législatives de se déterminer clairement sur tous les sujets abordés ce soir et nous dire comment ils vont réaliser cette œuvre de reconstruction qui devra être aussi forte que celle faite en 1944 /45 par  le Conseil National de la Résistance.

Nous devons être prêts à faire pression et chercher tous les points de convergences entre associations, mouvements, syndicats et partis se réclamant de la Mémoire de la Résistance.

 A la veille de 2012, échéance électorale, nous avons ensemble la volonté de voir refleurir les idéaux de la Résistance.

Nous ne pouvons rester impassibles devant la banalisation des idées d’extrême droite en France et en Europe.

Nous ne pouvons rester indifférents devant le démantèlement des acquis sociaux et culturels

du programme du Conseil National de la Résistance.

Nous avons une responsabilité historique

Nous appelons les nouvelles générations à réfléchir avec nous sur les causes toujours semblables de la montée des extrémismes de droite et des dangers que cela représente.

Nous appelons tous les démocrates et notamment les plus jeunes à se mobiliser pour participer à la rédaction du « projet de société du 21ème siècle » reprenant les principes du programme du Conseil National de la Résistance en les adaptant à notre époque.

Ce projet initié par « Citoyens Résistants d’Hier et d’Aujourd’hui » sera un élément déterminant de nos luttes futures

Nous mettrons, ensemble, tout en oeuvre, pour que ce projet prenne forme, 

pour que l'intelligence gagne du terrain sur l'intolérance. 

pour que la fraternité entre les hommes et la solidarité entre les Peuples fassent reculer l'intolérance et la barbarie,

pour que la responsabilité et la vigilance de chacun garantissent la Liberté de tous ceux qui vivent et qui vivront sur notre planète.

Comme Lucie Aubrac , nous disons que « le verbe Résister doit toujours se conjuguer au présent »

Vive la Résistance ! 

Marseille le 19 octobre 2011

18 octobre 2011

Appel des 500 (Théâtre Toursky à Marseille)

 


Dans le cadre de l'Université Populaire, lors de la conférence-débat organisée par ''Résister Aujourd'hui'' le 18 octobre 2011 : 
¤ contre la banalisation des idées d’extrême droite 
¤ pour la défense des conquêtes sociales et culturelles
du programme du Conseil National de le Résistance. 
¤ pour le respect de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

en présence de

Denise Toros-Marter - ancienne Déportée, Pdte de l’Amicale d’Auschwitz
Michel Caccioti, - ancien Résistant, Pdt de l’ARAC des B du Rh


mais aussi des Résistants d’aujourd’hui parmi lesquels : 


Patrick Pelloux -médecin urgentiste, président de l'AMUF
Catherine Lecoq -Comédienne, chanteuse, syndicat français des artistes
Hugues Leenhardt - enseignant en Résistance
Jean-Claude Aparicio - Ligue des Droits de l’Homme
Patrick Aït Aïssa - délégué CGT à Carrefour
Michel Vial  président de "Résister Aujourd’hui"

appuyé par un intermède musical avec

les Polyphonies Bourlingueuses

qui ont interprété

des chants de Résistance du Monde.


et la participation poétique de Richard Martin

Nous avons dépassé l’indignation                                                                et avons exigé le respect de la Mémoire de nos aînés,


comme Léo Ferré l'aurait fait,                                                                                      ensemble, nous avons donné l'alarme avec des cris d'oiseaux et adopté par applaudissements à l'unanimité des 500 participants la motion suivante transmise à nos gouvernants et aux candidat.e.s aux élections de 2012  : 


 Avec les "Citoyens Résistants d'Hier et d'Aujourd'hui" et l'association nationale ''Résister Aujourd'hui'' qui nous a réuni au Théâtre Toursky à Marseille, nous souhaitons que tous les citoyens, toutes les associations, tous les syndicat, tous les partis républicains participent à l'élaboration d'un projet de société            pour le 21 ème siècle en repartant du programme du CNR "les jours heureux" adopté le 15 mars 1944 par les résistants de toutes opinions.

Nous pensons que ce programme politique constitue toujours un repère essentiel
de l’identité républicaine française.


Nous soutenons les Vétérans de la Résistance
qui ont lancé l’appel de Thorens-Glières le 14 mai 2011,
et appelons, avec eux, tous les partis politiques, toutes les candidates et candidats à un mandat public dans le cadre des élections présidentielle et législatives de 2012 à prendre 3 engagements qui mettront réellement en application la devise républicaine « Liberté Egalité Fraternité ».


Premièrement, afin de garantir l’égalité :

Lancer immédiatement le travail législatif et réglementaire qui permettra de reconstituer les services publics et institutions créés à la Libération pour aller vers une véritable démocratie économique et sociale.                                          Possible en 1944, cette démarche l’est d’autant plus aujourd’hui, alors que le pays n’a cessé de s’enrichir depuis.
Droit à la santé pour tous, droit à une retraite, droit à l’éducation, droit au travail, droit à la culture demeurent les seuls véritables garants de l’égalité républicaine.
Une égalité qui n’a de sens que dans le respect du droit des étrangers.

Deuxièmement, afin de garantir la liberté :

¤ Approfondir la forme républicaine du gouvernement afin de séparer clairement les pouvoirs et renforcer la démocratie parlementaire au détriment de notre régime présidentiel personnalisé.
¤ Développer de nouvelles pratiques de la démocratie dans laquelle l’action de la société civile sera reconnue et restaurer les conditions du principe d’ailleurs défini à l’article 2 de la constitution actuelle : « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ».
¤ Garantir la qualité du débat démocratique et la fiabilité des contre-pouvoirs, en assurant à nouveau la séparation des médias et des puissances d’argent comme en 1944.
Ces 3 axes de débats devront aboutir à une démarche souveraine
d’« Assemblée constituante » vers de nouvelles pratiques républicaines.

Troisièmement, afin de garantir la fraternité :

¤ Travailler les coopérations avec les peuples et les pays, en refusant l’actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.
¤ Favoriser résolument des solutions soutenables pour les équilibres écologiques, dans les limites de développement compatibles avec la survie humaine.
¤ Ecarter de la marchandisation totale les besoins vitaux de l’être humain comme la santé, l’eau, la nourriture et l’énergie.

Il est temps de bien vivre ensemble, dans la haute-nécessité de l’épanouissement du plus grand nombre et d’offrir une perspective d’avenir prometteur aux jeunes générations.

Pour cela nous appelons ceux qui nous gouvern
ent ou qui veulent nous gouverner à prendre ces 3 engagements et à les appliquer.

adopté à l'unanimité des 500 participants, Marseille le 18 octobre 2011