Discours de Serge Vial , vice-président de « Résister Aujourd’hui »
Monsieur
le Maire,
Mesdames
et Messieurs les élus,
Chère
Renée, son épouse,
Chère
Monique,
Chers
amis,
Mesdames
et Messieurs,
Nous sommes certainement plusieurs ici, à avoir des modèles
familiaux qui ont guidé nos actes et forgé notre esprit : nous nous devons aujourd’hui, ne jamais
les oublier et continuer à les faire vivre pour dire à nos enfants et à nos
petits enfants :
« Oui, tu vois, cet homme-là, ce n’était ni Superman, ni Dark
Vador, c’était un homme ordinaire mais
qui a su dire « non », quand l’Histoire lui imposait de dire «non» et qui n’a
jamais douté que son choix était le bon car c’était celui de la liberté, Esprit
Garnerone était de ces hommes.
Il
est né le 9 juin 1926 dans un hameau du fond de la vallée du Piémont, dans la
province de Cuneo, au
sein d'une famille de cinq enfants.
En
1930, il a 3 ans, sa famille émigre en France pour fuir le fascisme et
s’installe à Ubaye, petite
ville engloutie aujourd'hui sous le lac de Serre-Ponçon.
Son
père Pierre, tailleur de pierre, travaille alors à la construction de la ligne
de chemin de fer de
Chorges à Barcelonnette, mais la grande crise de 1929 arrive en France, en 1933
: le chantier, bien
que construit à 80% s’arrête et la famille déménage pour Bâtie-Neuve, dans les
Hautes Alpes et
c’est là qu’Esprit grandit.
Il
a aimé ces quelques années passées au contact de la nature et n’a jamais oublié
son instituteur, Monsieur Gras, fils de paysan sorti de l’Ecole normale. En
1943, il a 17 ans et il est obligé de partir avec son père sur Toulon et
travailler pour l’organisation TODT, seul moyen pour eux d’éviter de devoir
partir travailler au S.T.O. en Allemagne.
Il
faut savoir que l’organisation TODT était une organisation allemande chargée de
la réalisation d'un grand nombre de projets de construction, dans les domaines
civil et militaire, tant en Allemagne que dans les pays d'Europe sous domination
nazie, de la France à la Russie et qu’il s’agissait de travail obligatoire.
Peu
de temps après leur arrivée, Esprit vit son premier bombardement et d’autres
suivent quasiment
tous les jours :
il
réussit à convaincre son père de quitter Toulon pour aller sur Orange, où
ils se font embaucher par une entreprise qui travaille, pour les allemands à
une extension de l’aérodrome en pleine campagne. Ils y restent quelques mois
jusqu’en juillet 1944.
C’est
là qu’Esprit apprend que les Américains ont débarqué en Normandie et il
convainc son père de fuir et de retourner à Bâtie-Neuve, ils prennent donc le
train qui relie Orange à Nyons, puis un car qui doit les ramener chez eux.
En
route, dans la vallée de Laigue, ils sont arrêtés par un contrôle de maquisards
:
Esprit
sait alors son chemin, ’il doit rester avec les combattants de l’ombre, les
FTP. (Francs
Tireurs et Partisans Français)
Après
15 jours d’instruction, il est affecté à un bataillon et participe à la
libération de la Drome, puis
se bat sur le front de la Maurienne fin Août 1944 puis se rend en Italie à
Suze.
Il
participe à l’occupation en Italie, puis
remonte vers le Jura et est envoyé avec son régiment pour occuper Vienne en
Autriche.
En
Octobre 1945, il est démobilisé et rentre chez lui avec une prime de 1 000
francs, un
mois de permission et sa solde en poche. Maintes fois médaillé, puis
naturalisé Français par la Patrie Reconnaissante en 1946, il est reconnu pour
son courage, ses
valeurs laïques et républicaines.
En
1946, à 20 ans, il quitte son petit village alpin avec ses parents pour
s’installer à Marseille, à
la Pointe-Rouge où il restera jusqu’en 1951.
Il
garde un très bon souvenir de cette période : il était jeune et tout était à
reconstruire.
Il
adhère en 1949 au parti communiste par fidélité à ses camarades du maquis,
milite activement, rentre à la C.G.T et découvre la condition des ouvriers dans
le système capitaliste.
Quand
Esprit raconte sa vie, il la découpe en 4 grandes périodes ;
d’abord
l’école avec Mr Gras, puis la résistance, puis la vie militante et enfin, la
rencontre avec Renée, sa femme, qui
lui fit découvrir un monde plus tendre, fait de sensibilité et de culture :
ils
auront ensemble, 4 filles dont il était si fier.
Et
quand il parle de ses amis de Port de Bouc et d’ailleurs, il en parle avec
beaucoup d’affection car
lui savait qu’au-delà de l’amitié, il y avait la fraternité, et il savait de
quoi il parlait, car
la fraternité, il l’avait incarnée pendant ses années de Résistance.
Merci
aux habitants de Bouc-Bel-Air et à leur municipalité, d’honorer sa mémoire et
de permettre aux nouvelles générations de se rappeler que « Résister se
conjugue au présent.» comme le disait Lucie Aubrac, grande figure de la
Résistance française, membre
de notre comité de parrainage.
Au
nom de notre association, Je
voudrai dire à Esprit, à sa famille, à ses proches et
à toutes celles et tous ceux qui se
sentent héritiers des valeurs de la Résistance que
nous continuons et continuerons son combat pour
favoriser le progrès humain face à l’indécence des puissances d’argent, pour
prendre part à la construction d’une société plus juste,
plus fraternelle à l'image de celle pour laquelle les Résistants et les
Déportés se sont battus souvent jusqu'au sacrifice suprême.
Pour
Catherine Piat, présidente de « Résister Aujourd’hui »
le
vice-président, Serge VIAL