03 février 2017

Le terrorisme islamiste et le terrorisme d'extrême droite sont les deux faces d'une même pièce, celle des identitaires

 

Face au totalitarisme islamiste, face à la résurgence de la violence d'extrême-droite, nous devons incarner le monde libre, celui qui croit en l'universalisme de certains principes.

Oui, le crime commis à Quebec, dimanche soir, envers des musulmans réunis tranquillement à la mosquée pour prier est un acte terroriste.

Oui, comme tout acte terroriste, il est l'oeuvre d'une haine, souvent elle-même fruit de la cristallisation de fantasmes nourris envers une communauté, un groupe.

Et si cet attentat entre en résonance avec le "Muslim ban" de Donald Trump, c'est parce qu'il en est le produit.

D'un côté de la frontière nord-américaine, l'homme le plus puissant du monde interdit de territoire des musulmans de 7 pays, afin de lutter contre le terrorisme. Or, l'Arabie saoudite et l'Égypte, pourtant pas franchement neutres en la matière, en sont exclues. Il semble donc que cette décision soit plus motivée par le désir de flatter les bas instincts de ses électeurs que par un quelconque souci d'efficacité. La mise en scène de cette décision et son application au mépris du droit, témoigne du retour à une vision de la politique comme tribale et archaïque, où le pouvoir s'exprime plus dans les caprices et la volonté de puissance d'un individu, que comme une responsabilité qui vous dépasse, vous engage mais aussi vous lie. En démocratie, le président est le garant des institutions, pas celui qui acquiert le droit de les bafouer. Avec le "Muslim ban" et son comportement d'adolescent incapable de supporter la moindre frustration, il a désigné une cible, non l'islamisme radical comme idéologie, mais les musulmans en tant que personnes. Ce faisant, il amène des personnes fragiles à se lâcher, car le fait de se sentir soutenu en haut lieu, légitime les dérapages verbaux et provoque les passages à l'acte. L'absence de tenue et le comportement régressif du dirigeant de la première puissance mondiale montrent ce que le populisme au pouvoir provoque : une vision reptilienne de la politique qui exacerbe les tensions et justifie toutes les pulsions.

Sans compter qu'aujourd'hui, les actes terroristes sont rarement commis par des étrangers mais souvent par des personnes nées ou présentes dans le pays depuis des années. Les auteurs de l'attentat contre le marathon de Boston en 2013, étaient arrivés sur le territoire américain respectivement à 7 et 14 ans et y résidaient légalement. Celui de l'attentat d'Orlando, dans la boîte de nuit gay, était né à New-York...

De l'autre côté de la frontière, un "nerd" (entendez une sorte d'asocial solitaire nourri de théories farfelues) un peu plus paumé que les autres, dont les modèles politiques étaient justement Donald Trump et Marine Le Pen, est passé à l'acte et a tué. On saura peut-être un jour comment un citoyen plutôt ordinaire décide d'aller commettre un massacre parmi d'autres citoyens ordinaires, tout comme lui, dont les seuls crimes sont d'être musulmans.

C'est ainsi que le puissant et le misérable, le Président et l'associal se retrouvent liés dans la haine mais aussi dans l'imbécilité.

En quoi la mesure prise par Trump freinera les ardeurs éventuelles de nombre de convertis aux patronymes européens ou anglo-saxons, embrigadés par l'islamisme radical ? Cette humiliation envers les ressortissants étrangers visés est contre-productive et risque surtout d'accrocher une cible dans le dos des citoyens américains...

En quoi assassiner des musulmans permet de lutter contre le terrorisme islamiste? En France, après les attentats que nous avons subis, les actes anti-musulmans ont rapidement augmenté, mais heureusement, jamais ils n'ont atteint le degré d'horreur qu'a connu Montréal dimanche dernier. D'ailleurs, si l'on en croit les dernières statistiques, ils sont aujourd'hui en décrue. C'est donc plutôt l'exceptionnelle tenue du peuple français qu'il faut saluer en la matière.

Mais si demain, la fachosphère nourrissait la mauvaise idée de suivre l'exemple du tueur canadien, elle ne ferait que servir les intérêts des officines communautaristes comme le CCIF, l'UOIF ou le PIR. Drapées dans la lutte contre l'"islamophobie", celles-ci n'ont de cesse, sous couvert de dénonciations d'actes antimusulmans (ce qui est légitime), de faire taire toute critique supposée de l'islam (ce qui ne l'est plus). Au prétexte que de tels actes seraient la conséquence du racisme latent de nos sociétés, ils nient la violence de leur propre idéologie, les massacres, les violences et les affrontements que leur volonté de pouvoir et leur impérialisme déchaînent partout dans le monde. Ils cherchent ainsi les causes du rejet dans la nature même des sociétés qu'ils attaquent, plutôt que dans leur propre volonté d'assimiler pratique de l'Islam et adhésion à une idéologie totalitaire politico-religieuse. Par extension, la laïcité étant une loi raciste à leurs yeux, elle est aussi désignée comme la source des violences antimusulmanes. La boucle est ainsi bouclée: la laïcité stigmatise les musulmans, il faut donc abolir cette loi.

L'attentat contre la mosquée de Montréal nous démontre tout le contraire. Il a eu lieu aux pays des "accommodements raisonnables", au sein d'une société qui a accepté d'incessantes revendications séparatistes au nom de la religion et qui a épousé le multiculturalisme au point de ne plus se définir que par une tolérance qui confine à la négation de soi. Cette politique est à l'opposé de la laïcité à la française. Et pourtant, elle n'a pas pu empêcher le drame canadien. Voilà qui devrait donner à réfléchir aux idiots utiles de l'islamisme!

Car en réalité, terrorisme islamiste, terrorisme d'extrême-droite sont les deux faces d'une même pièce: celle des identitaires. Des esprits étroits incapables de penser le monde au-delà de leur personne, leur famille ou leur clan. Ceux-là mêmes qui confondent identité et consanguinité, ceux qui séparant l'humanité en deux: "eux et les autres" et aspirent à soumettre ou éradiquer cette autre moitié.

La haine et l'imbécilité n'ont pas de frontières ni géographiques, ni idéologiques. 6 personnes l'ont payé de leur vie, 5 luttent encore contre la mort, des familles sont dévastées et toute une communauté se sent menacée. Et il y aura d'autres drames et d'autres morts encore si nous ne tenons pas cette ligne de crête: face au totalitarisme islamiste, face à la résurgence de la violence d'extrême-droite, nous devons incarner le monde libre, celui qui croit en l'universalisme de certains principes.

C'est en cela que la laïcité n'est pas seulement une particularité française, mais un outil formidable d'émancipation des hommes et de souveraineté du peuple. Permettre à l'individu de pratiquer la religion de son choix, de croire, de ne pas croire ou de changer de religion, c'est lui donner aussi les moyens de sortir d'une assignation identitaire, voire d'une assignation sociale ou sexuelle. Sans liberté de conscience, le droit à disposer de son corps, de choisir son orientation sexuelle n'auraient jamais été acquis. Qu'il soit islamiste ou d'extrême-droite, c'est aussi à ce patrimoine de conquêtes sociales et culturelles que les tueurs s'attaquent.

 

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