Déclaration de Michel VIAL, président de « Résister Aujourd’hui », le 20 mai 1997 à Aix en Provence à la conférence de presse de M. Claude MAIGNANT.
Je voudrais, d’abord, en quelques mots vous présenter notre association.
Créée en 1985 en Auvergne puis en 1994 en PACA.Nous voulons unir en une seule association toutes celles et tous ceux qui veulent perpétuer la mémoire de la Résistance et de la Déportation.
En nous appuyant sur :
¤ sur les valeurs de la République que défendait la Résistance : la Démocratie, la Liberté, l’Egalité, la Fraternité, les Droits de l’Homme,
¤ sur le programme du C.N.R. (conseil National de la Résistance)
Nous dénonçons toutes les résurgences actuelles racistes, antisémites, xénophobes et néo-fascistes, aussi bien en Europe qu’en France même.
Nous sommes conscients que la Paix régnant, depuis 1945, en Europe occidentale ne se maintiendra que si l’on fait barrage aux idéologies totalitaires et d’intolérance.
Dès notre constitution, en 1994, Rémi Darne adhérait à notre association et nous partagions son analyse sur l’armée face à la Démocratie. Claude Maignant rejoignait notre association à son tour et nous dénoncions, à ses côtés, l’arbitraire dont il était l’objet et l’étouffement de l’affaire du lycée militaire d’Aix par les autorités militaires et gouvernementales. Nous stigmatisions ces dernières qui semblaient vouloir ignorer et nier l’influence de l’extrême-droite dans les écoles militaires, et trouver naturel la pratique des chants nazis et l’apologie de l’Allemagne hitlérienne et de son valet Pétain.
Nous nous réjouissons, aujourd’hui, aux côtés de Claude Maignant, que le comité des ministres de la communauté européenne condamne la France, en 1997, pour le mauvais fonctionnement de sa justice mais le problème demeure : il faut que les instigateurs de la cabale contre les deux professeurs du lycée militaire d’Aix-en-Provence soient poursuivis.
Nous le demandons avec force et restons, sur le plan général, très vigilants devant la montée des intégrismes et des néo-fascismes, notamment contre la montée des idées souvent insidieuses du Front National en France. Un parti qui nie en bloc ce dont on l’accuse : son intolérance, son racisme, son antisémitisme.
C’est parce que nous sommes fidèles à la mémoire de la Résistance et de la Déportation, que nous ne baisserons jamais la garde contre cette résurgence.
Dans les années trente, c’est la passivité des démocraties et des démocrates qui permit l’ascension de Hitler et le désastre qui s’en suivit pour l’Europe.
C’est parce que nous sommes fidèles à cette mémoire et aux leçons de l’histoire que nous sommes très inquiets des conséquences que pourraient avoir les décisions de Jacques Chirac et de sa majorité sur la conscription.
Nous n’acceptons pas que l’on supprime ce lien entre l’armée et la nation, ce qui pourrait provoquer des dérives dangereuses.
Nous pensons que la défense doit être indissociable de l’idée de nation, de civisme et de citoyenneté.
Pour nous faire accepter le rendez-vous citoyen de quelques jours, les menaces ont été éludées : « plus de menaces extérieures ». Aujourd’hui, mais demain ?
Les menaces intérieures, elles, sont pourtant présentes. Veut-on les ignorer? Pourquoi?
Est-ce ou non l’idéologie raciste et xénophobe de Hitler, la servilité de Pétain à ces thèses qui furent responsables de la souffrance et de la mort de millions d’êtres humains?
Cette idéologie ne nourrit-elle pas, trop souvent, les propos et les écrits actuels du Front National?
Jean-Marie Le Pen n’est-il pas ami de tous les néo-fascistes européens?
(Dis-moi qui sont tes amis je te dirai qui tu es.........)
Comment ne pas s’interroger sur la position de Le Pen à Toulon le 15 mars 96 qui demandait un durcissement des « décisions » de Chirac sur la conscription.
Comment ne pas se rappeler que Jean-Marie Le Pen, dans ses « 300 Mesures » s’engage à constituer une garde nationale et à remplacer la conscription par le volontariat.
Ces idées seraient-elles appliquées avant même que Le Pen arrive au pouvoir?
Nous pensons, quant à nous, que la suppression du service militaire obligatoire et universel serait néfaste pour la République.
L’Armée, coupée de la Nation, éloignée des citoyens, pourrait être, entre les mains de certains « politiques » d’extrême-droite, à l’origine de dérives dangereuses.
Il est indéniable que les idées d’extrême-droite, notamment celles du Front National, sont de plus en plus infiltrées dans toutes les administrations, y compris la Police et l’Armée.
Un pouvoir militaire, totalement autonome, n’acceptant pas les valeurs de la République, entre les mains d’un président pouvant exercer les pleins pouvoirs en vertu de l’article 16 de la constitution, n’aurait plus aucun contrôle de la Nation.
Les Résistants et les Déportés, par leurs combats contre le fascisme et le nazisme, par leurs sacrifices, nous ont rendu la Démocratie et la Liberté.
Or, à l’aube de l’an 2 000, celles-ci sont encore menacées.
Chaque citoyen a, aujourd’hui, le devoir de défendre ces valeurs. Il doit avoir, aussi, le droit et la capacité de « porter les armes » au sein de l’armée de la République.
Au moment où les idéologies racistes et xénophobes, véhiculées par l’extrême-droite et soutenues tacitement par une partie de la classe politique, resurgissent, il faut apprendre à la jeunesse l’esprit civique, le sens de la citoyenneté et la tolérance.
Cette tolérance s’apprend dans le brassage des individus, des cultures et des mentalités.
La conscription, comme l’école, est un des rares moyens de brassage et d’intégration au moment où les lieux de socialisation notamment les partis politiques, les syndicats et les Eglises sont en crises profondes et où la fracture sociale prétendument raciale continue de s ’aggraver.
A contrario, une armée de métier, sans état d’âme, sans le moindre sens civique pourrait représenter un danger pour la Démocratie. N’oublions pas que les trois premières Républiques furent renversées par un coup d’état militaire : 18 Brumaire, 2 décembre 1851, Juin 1940.
C’est un pouvoir militaire, installé à Alger, qui conduisit à la chûte de la 4ème République en 1958, et le putsch militaire d’avril 1961 n’a pu avorter que grâce au comportement républicain du contingent et à l’action du général De Gaulle.
Il est donc impératif de maintenir la conscription de toute une classe d’âge dans un service national, d’une durée plus courte. Celui-ci comprendrait, obligatoirement, une formation militaire (classe....) et Républicaine pour tous, sous réserve du droit à l’objection de conscience.
Il pourrait être suivi d’un service civil ( Humanitaire, solidarité, écologie).
Cette conscription égalitaire et citoyenne ( 2 ou 3 mois minimum) devra être encadrée par des officiers, ayant reçu eux mêmes une éducation Républicaine nécessaire et suffisante.
Ces officiers, recrutés dans les lycées civils de l’éducation Nationale, seraient formés par un véritable enseignement universitaire dans les Grandes Ecoles Militaires, et n’appartiendrait plus à une même caste.
La discipline, l’obéissance aux ordres, ne doivent jamais prendre le pas sur la conscience humaine. Ceux de la « France libre » ont su dire non en 1940. Les militaires ont, aujourd’hui encore, le devoir de résister à un ordre contraire à la Déclaration des Droits de l’Homme.
Nous nous rappelons des appelés ( les fameux gars du 17 ème ) refusant en 1905 de charger les manifestants vignerons à Montpellier et des appelés et rappelés, en Algérie refusant de suivre les Généraux putschistes en 1961.
En conséquence, nous sommes profondément contre la professionnalisation de l’armée et demandons que le service militaire actuel, raccourci, soit complètement réorganisé, ne soit plus ressenti comme une perte de temps, par les jeunes, et redevienne ainsi le lien nécessaire entre l’Armée et la Nation citoyenne.
"Résister Aujourd’hui" le 20 mai 1997
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire